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Photo du rédacteurNatacha de Santignac

Céline Loretan - Une fleuriste sensible et attentive

Céline Loretan naît à Aigle en 1988, mais habite Massongex depuis sa plus tendre enfance. Fleuriste de son état, artiste en son âme, elle m’a accueillie avec un sourire éclatant dans sa jolie boutique au cœur d’Aigle, chaussée de ses fidèles Dr. Martens!

 

De quand date votre passion pour les fleurs?

«J’ai toujours beaucoup utilisé mes mains. Au départ, j’avais pensé devenir maîtresse de travaux manuels, mais en classe, j’avais du mal à me concentrer, à rester assise, alors j’ai compris que cela n’irait pas. J’aimais plus que tout me promener dans la nature avec mon chien, en solitaire. À force d’y passer mon temps, les fleurs ont attiré mon attention, et je m’y suis intéressée de plus près.»

 

Quelle filière avez-vous entreprise?

«J’ai commencé par l’École pour fleuriste de Lullier dans le canton de Genève. J’étais en internat, mais le cursus était trop scolaire, je ne l’ai pas poursuivi. Un de mes professeurs m’a aidée à trouver une place d’apprentissage. Cette formule correspondait mieux à mon besoin d’indépendance et de créativité. Je passais la majorité de mon temps dans la boutique de Madame Martin, “Fleuridées” à Montreux, une femme extraordinaire, présidente de la section romande de l’Association Suisse des Fleuristes. J’étais très heureuse, ma patronne m’a donné beaucoup d’amour et de liberté, même si ce n’était pas toujours simple pour elle de gérer une adolescente comme moi!»

 

Que dire de votre entrée dans le monde professionnel?

«Les débuts ont été mouvementés : de beaux moments, mais aussi des passages à vide. J'ai touché a pas mal de métiers, et suis passée par la case chômage, pas facile pour une fleuriste, mais je suis une battante : j'ai travaillé dans le nettoyage des trains, à la Coop pour vivre. Rapidement, j’ai ressenti le besoin de me replonger dans l'univers des fleurs. Ma créativité me manquait. Soudain une offre dans une chaîne de magasins de fleurs. À ce moment-là, je me suis dit : “Si ça ne fonctionne pas, c'en est terminé des patronnes“. La collaboration n’a pas été fluide, et je ne suis pas restée. Ensuite, Carole, la fleuriste d’Aigle m’a contactée pour un remplacement. Un vrai coup de cœur mutuel s’est produit. La machine s'est mise en route, et je suis devenue fleuriste indépendante.»

 

Comment passer du « Jardin de Carole » « Au son des fleurs » ?

«Grâce à un travail sur moi-même et une certaine maturité, j’ai pu voir le chemin vers une vie plus tranquille en lien avec la nature. L’envie profonde de créer mon univers, mon havre de paix, s’est révélée. Reprendre le “Jardin” est apparu comme une évidence. Je devais toutefois m’approprier le lieu. La première étape en était le nom. J’en voulais un original. Mon chéri et moi avons beaucoup discuté, il a pensé au clocher de la maison. Immédiatement, j’ai été séduite. Les vibrations incarnent une énergie qui me parle, les fleurs y sont très sensibles. Peut-être est-ce pour cela qu’elles occupent le rez-de-chaussée de l’immeuble depuis si longtemps!»

 

Comment avez-vous conçu son aménagement?

«J’ai la chance d’avoir quatre vitrines, cela me permet de créer des atmosphères très différentes dans chacune d’elles. Jouer avec les couleurs, la sensation des textures me plaît. Je propose également de petits objets de décoration avec ou sans fleurs, ce qui met en contexte les bouquets ou les arrangements. Je suis contente de travailler avec des artisans locaux dans ce cadre.»

 

Qu’aimez-vous le plus dans votre métier?

«C’est une question piège ! Je ne peux pas vraiment choisir. J’aime le contact, les discussions, tout le monde est le bienvenu, mais j’aime aussi la solitude de la création. J’aime écouter les demandes pour des occasions, comme des funérailles par exemple. Je suis attentive au besoin de mon interlocuteur, mais surtout je cherche à connaître les goûts culinaires, esthétiques, littéraires, etc., du défunt. Tous ces éléments m’aident à imaginer des arrangements très personnalisés qui font sens, honorent sa mémoire et apportent réconfort.»

 

Avez-vous un porte-bonheur?

«Oui, une fleur ! L’heliconia she Kong. Mi-végétale, mi-animale, pour moi, elle me fascine. Je l’avais utilisée lors de mon examen pour créer l’atmosphère d’un souper ethno en tête à tête. J’avais dressé la table avec une magnifique peau de serpent appartenant à mon oncle qui a vécu en Afrique. On s’y serait cru!»

 

 

Les coups de cœur de la fleuriste

 

Gerbera spider: dynamique, élégante tout en étant rebelle, cette fleur, au cœur de velours, aux pétales en bataille, et aux teintes énergisantes, donne toujours du peps à un bouquet, à la mariée qui le porte ou à la pièce qui l’accueille!

 

Amaryllis: grande, élancée, cette fleur est un peu la «géante au pied d’argile». Elle est forte, mais sa tige est fragile. Parfois livrée en bulbe ciré, elle ne nécessite pas beaucoup d’entretien, et se plaît à déployer ses couleurs profonde, rouge et rose, ou son blanc satin, en majesté.

 

Monstera variegata: drôle de nom pour une drôle de plante imposante devenue célèbre en raison de taches blanches dues à une maladie. Une vraie merveille imparfaite de la nature. Une star sur Instagram!

 

Hortensia: une plante fidèle, robuste et attendrissante. Les jardins aiment retrouver sa panoplie de teintes allant du blanc au bleu intense en passant par une infinité de roses. En séchant, elle apporte de la douceur dans les maisons.



Une femme tient une rose orange et jaune dans un magasin de fleurs
L'important, c'est la rose. Natacha de Santignac

 

Quand je serai grande…

 

La journée radieuse se prêtait à la flânerie, et elle décida de se laisser guider par le vent en attendant l’heure du dîner. La clairière, belle et fraîche, l’invitait à la découverte. Son regard la balaya avec satisfaction. Elle ramassa une fleur, puis deux, puis trois : une rouge, une violette, une jaune. Elle aima le contraste violent des teintes, tout en s’étonnant des frissons qui parcoururent son corps, et du plaisir qu’elle ressentit à observer sa création. Ses yeux arpentèrent les alentours, et sans plus attendre débusquèrent des tiges d’un vert profond, chaleureux qui sauraient harmoniser le mélange. Une mélodie enfantine se mit à frémir sur le bout de ses lèvres tandis qu’elle cherchait ardemment à nouveau du rouge, du violet et du jaune pour étoffer son œuvre. Lorsque sa maman l’appela, elle rapporta triomphalement un majestueux bouquet, et dit: «Quand je serai grande, je serai une fleuriste sensible et attentive».

 

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