Les lumières commencent à se rallumer tout doucement dans la salle. Personne ne bouge, et on distingue à peine la respiration des spectateurs. Tout le monde demeure scotché à son fauteuil, le souffle coupé, et les méninges en ébullition! Quel film!
Quel film ? Julieta de Pedro Almodóvar. Un véritable condensé de vie, qui vous appelle, vous entraîne au plus profond de votre être, vers les questionnements les plus intimes, vers les choix les plus déchirants.
C'est magistralement interprété. Emma Suárez nous frappe en plein cœur tant dans son bonheur que dans sa détresse, Adriana Ugarte incarne parfaitement la femme libre aux prises avec la jalousie, Rossy de Palma, telle une ombre, laisse planer les doutes et sème le trouble en nous glaçant. Le ton est juste du début à la fin, pas une fausse note. L'impact puissant, car tous, absolument tous pouvons nous retrouver dans les méandres de la vie de Julieta. Chacun de nous a un jour fait face à une situation difficile aux conséquences plus ou moins tragiques à long terme. Chacun de nous a expérimenté le poids des secrets et des non-dits. Chacun de nous a connu les déchirements liés à la perte d'un être aimé. Chacun de nous a dû se réinventer.
Le film ne donne pas de leçon. Il raconte, avec brio, la vie de ses personnages si proches et pourtant si lointains. Il déploie le long voyage de Chronos, et comme celui-ci ne change finalement rien à l'affaire, et ce malgré tout ce qu'on veut bien nous faire croire. Julieta nous met face à nos propres doutes sur les relations humaines, les liens, et par-dessus tout sur nous-mêmes.
Que faisons-nous de notre vie? Qu'en attendons-nous? Savons-nous être attentifs aux êtres la peuplant? Sommes-nous conscients de notre impact sur la vie des autres? Qui voulons-nous être? Qui sommes-nous?
Cannes a boudé, une nouvelle fois, un metteur en scène hors-pair, ne vous fiez pas à son verdict : allez voir Julieta!
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