Personnalité plurielle, Natacha de Santignac publie son premier roman « Elles », aux éditions Persée, tel un hommage aux femmes. Cette journaliste historienne polyglotte cultive la joie de créer. Portrait d’une lady pas comme les autres !
« La vie, c’est une blague », lance Natacha en mimant ses mots avec le sourire d’un claquement de doigts. À tout juste cinquante ans, elle semble déjà en avoir vécu plusieurs avec l’intensité de ceux qui aiment. Pas question de perdre une seule miette de toutes les beautés qui l’entourent et inspirent sa créativité débordante. Et puis, il y a la joie des voyages et des rencontres. Ces regards croisés un jour ou depuis toujours qui révèlent son âme d’enfant.
Cette écrivaine française née à Douai dans le Nord de la France habite en Suisse depuis plus de vingt ans. Elle en a manifestement adopté les codes : elle arrive à l’heure au rendez-vous dans un lieu branché de Sion. Natacha porte une robe coquette aux multiples pastels. Pas de café, juste la simplicité d’un verre d’eau. Le sourire éclatant, elle se confie avec un brin de pudeur.
Un premier roman qui lui ressemble
Celle qui n’a jamais voulu d’enfant commence par évoquer son dernier-né : « Elles », paru aux éditions Persée. Accoucher d’un premier roman, c’est un peu rassembler des fragments de son existence et inventer une fiction. L’écrivaine choisit de tirer le fil d’un secret de famille. Tout part d’une lettre retrouvée dans la chambre de « Mams ». Natacha emmène alors le lecteur dans une histoire d’amour singulière qui vient bouleverser nos vies et les certitudes de ses personnages.
Natacha adore les histoires : « Elles me font voyager dans le temps. » Depuis petite fille, elle dévore les livres comme les Misérables ou la Bible en BD. Elle s’émerveille aussi des récits de Louis, son grand-père historien. « Je réalise que ce roman représente l’aboutissement d’un besoin viscéral de raconter, mais surtout un hommage aux femmes, à travers toutes celles que j’ai rencontrées », confie l’auteur. Natacha de Santignac ne cache pas son côté féministe : « J’ai longtemps voulu être un garçon parce que tout semblait plus facile, aujourd’hui j’encourage mes sœurs à prendre leur place et à oser exprimer leur unicité. »
Une éternelle exploratrice
Pourtant, l’écriture s’imposera à elle des années après ses études d’histoire et d’anglais. Entre-temps, elle devient l’assistante d’un photographe. « Il m’apprend à regarder et j’apprivoise ma créativité. » Après une année à Londres, la jeune femme revient à Lille enseigner l’anglais dans une école de langues pour adultes. Elle y rencontre son futur époux Andrew avec qui elle partagera quinze ans de vie. En 2001, le couple pose ses valises à Genève. Malgré son âme de globe-trotteuse : « J’ai visité cinquante-huit pays avec un coup de cœur pour le Japon », Natacha explique que la Suisse représente un choc culturel : « Genève ne t’adopte pas, tu dois chercher toi-même les portes d’entrée. »
En 2016, elle affronte un second choc, et entame le deuil de son mari, après l’avoir accompagné avec respect durant cinq ans, comme une évidence, dans un long combat contre la maladie. « Je décide pendant cette période de continuer à voyager ponctuellement pour tenir le cap, rester vivante, et lui raconter la pulsation du monde, afin qu’il puisse rêver depuis la maison d’abord, puis l’institut où il a vécu une année ».
Une passion pour les histoires
Pour remettre de la joie dans sa vie, Natacha commence alors vraiment à écrire. Puis elle entreprend des études de journalisme par correspondance. Son diplôme en poche, elle entame une carrière de pigiste auprès de différents médias romands. Dans ce prolongement, la jeune femme savoure plusieurs stages d’écriture, notamment un animé par l’écrivain français Pierre Assouline. Elle y ébauche le premier chapitre de « Elles ». Depuis, les mots ne la quittent plus. Natacha affectionne particulièrement de mettre en avant par sa plume des femmes et des histoires de vies singulières. Elle a rédigé entre autres le magazine régional de Martigny « Le Carrefour ». Elle travaille d’ailleurs déjà sur son prochain roman historique sur un fond de seconde guerre mondiale en Allemagne.
Créer pour s’émouvoir
Depuis 2018, Natacha habite en Valais : « C’est ici que je me sens vraiment chez moi. » Sa joie de vivre semble s’y exprimer davantage encore. Son esprit libre et « kaléidoscopé » l’emmène dans toutes sortes de créations, entre peintures, photographies et carnets de voyage. Un brin espiègle avec ses cheveux bouclés, elle se décrit « comme une gitane amoureuse des brocantes et des gens. » Natacha rit aux éclats : « Je suis une éponge qui capte tout avec émotion. » Cette émotion, elle la cultive aussi à travers son autre grande passion : le chant. L’opéra c’est encore une affaire d’histoires et de rencontres avec son orchestre, sa musique, ses costumes et ses décors. Son coup de cœur lyrique : Le Nozze di Figaro de Mozart. « J’aime être sur la scène et offrir tout ce que je peux », souffle Natacha. Le chant permet aussi d’explorer autrement les différentes langues qu’elle maîtrise, comme l’italien ou l’allemand, sans oublier le russe, mais surtout l’anglais qui fait partie de son ADN.
Avant de terminer cette rencontre, la jeune femme de mère anglaise évoque encore les étés passés enfant avec son frère et sa sœur en Angleterre. Dans le jardin de ses grands-parents, la dégustation du thé ne s’improvisait pas. Natacha rit de ce souvenir qui remonte soudain à sa mémoire : « Il était hors de question de tremper son biscuit dans ce breuvage sacré, cela ne se faisait pas. » D’ailleurs, sa grand-mère « Nana », nonante-cinq ans, vit toujours. Il y a aussi ces ambiances dans le Sud de la France chez une amie de la famille qui tricote des pulls et sèche sa laine teintée entre ses figuiers. Et enfin, toutes ces grandes histoires d’amitié qui la font vibrer. Natacha de Santignac aime définitivement les gens. Elle aime surtout tisser des liens dans la vie et dans ses livres. Son éclat, sa plume authentique et la magie avec lesquels elle pose son regard sur tout font d’elle une personnalité et une artiste qu’on n’oublie pas.
Yannick Barillon
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